La Basilique Notre-Dame de la Garde : L'histoire de la Bonne mère de Marseille

4848 km

Rue Fort du Sanctuaire Marseille Bouches-du-Rhône

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La basilique Notre-Dame de la Garde est un monument historique et religieux emblématique de Marseille. Située sur une colline surplombant la ville, elle a une histoire riche qui remonte à plusieurs siècles.

« C’est elle qu’on voit de la mer, première et dernière sur son sommet tout de lumière ourlé de bleu, dominant sa Provence grecque qui sait ou ne sait plus qu’elle l’est, mais le reste. Qui manquera, croyant ou non, de monter à la Bonne Mère ? » Marie Mauron

La colline de la Garde, lieu stratégique synonyme de pouvoir

[caption id="attachment_15034" align="aligncenter" width="1179"] Vue cavalière de Marseille en 1572, au premier plan fort Notre-Dame-de-la-Garde.[/caption]

Là haut sur la colline

En 1214, Maître Pierre un prêtre de Marseille a une idée : Il veut construire une chapelle dédiée à la Vierge Marie sur la colline de la Garde. Mais cette colline appartient à l'abbaye Saint-Victor, et maître Pierre doit demander l'autorisation à l'abbé pour commencer les travaux. L'abbé accepte et autorise maître Pierre à construire une chapelle, mais aussi à y planter des vignes et y cultiver un jardin. Quatre ans plus tard, la chapelle est terminée. Après la mort de Maître Pierre en 1256, la chapelle de Notre-Dame-de-la-Garde devient en prieuré. Comme le prouvent des testaments de l'époque, de nombreux dons sont faits à cette chapelle depuis sa création. Ces donations témoignent de la dévotion populaire envers l'église, et vont continuer à se développer au fil des siècles.

Une histoire aux multiples rebondissements 

Avant la construction de la célèbre Basilique Notre-Dame-de-la-Garde, la colline de Marseille était déjà un lieu stratégique, doté d'une chapelle dédiée à la Vierge Marie. En janvier 1516, le roi François Ier visite la chapelle avec sa mère Louise de Savoie et sa femme, la reine Claude. C'est lors de cette visite qu'il réalise l'importance de renforcer les défenses de la ville, surtout après le siège de 1524 par Charles III de Bourbon.

François Ier décide alors de construire deux forts pour protéger Marseille : le château d'If et le fort de Notre-Dame-de-la-Garde. La construction du fort débute en 1531 et s'achève en 1536. Les matériaux utilisés proviennent du cap Couronne et de bâtiments démolis en dehors des remparts de la ville. Le fort adopte une forme triangulaire et se dote de l'éperon royal, qui reste bien visible à l'ouest de la basilique actuelle.

Au cours des guerres de religion, la colline et son fort sont au cœur de nombreux conflits. Hubert de Garde de Vins tente de s'emparer de Marseille en 1585 en prenant le contrôle du fort. Plus tard, en 1591, Charles Emmanuel, duc de Savoie, ambitionne de prendre l'abbaye de Saint-Victor et charge le gouverneur de Notre-Dame de la Garde de mener l'opération. Charles de Casaulx, premier consul de la ville, parvient finalement à prendre le contrôle du fort en 1594.

Le roi Louis XIII visite Notre-Dame-de-la-Garde en 1622, et plusieurs gouverneurs notables résident ensuite au fort, dont Georges de Scudéry et sa sœur Madeleine de Scudéry, écrivains célèbres de l'époque. Pendant la Fronde, en 1650, le comte d'Alais tente de s'emparer du fort pour réprimer la révolte marseillaise, mais les consuls de la ville réagissent et contrarient ses plans.

Notre Dame de la Garde pendant la révolution

Notre-Dame-de-la-Garde connaît des bouleversements durant la période révolutionnaire. Le 30 avril 1790, des patriotes envahissent le fort en utilisant un stratagème pour assister à une messe dans la chapelle. Les troubles s'intensifient le 7 juin 1792, lorsque la statue de la Vierge est parée d'une écharpe tricolore et l'enfant Jésus, d'un bonnet phrygien. En novembre 1793, le culte est interrompu, et les objets de valeur sont vendus aux enchères.

En avril 1793, le fort devient une prison pour plusieurs membres de la noblesse. Parmi eux se trouvent le duc Philippe d'Orléans et sa famille. Tous sont détenus dans les anciens appartements du gouverneur. Des conditions de détention pas si difficiles, quand on sait qu'ils bénéficiaient de la terrasse pour profiter du panorama exceptionnel. D'ailleurs la duchesse de Bourbon immortalisera cette vue magnifique en la dessinant. Ils resteront ici 3 semaines avant d'être transférés au fort saint Jean.

Escaramagne, l'homme providentiel

[caption id="attachment_15035" align="aligncenter" width="1374"] Procession au lendemain de la Fête-Dieu, XVIIIe siècle.[/caption]

Cet homme c'est Joseph-Elie Escaramagne. Un ancien capitaine de navire, qui prend la chapelle en location en 1795. Ce royaliste convaincu a frôlé la guillotine en 1794, pour avoir vendu des canons et des fusils à l'armée fédéraliste marseillaise. Depuis il voue une profonde dévotion à la Vierge Marie et s'engage à rénover et redynamiser le sanctuaire. Pour cela il commence par acheter une statue en bois de la Vierge à l'enfant, surnommée « la Vierge au bouquet ». Cette statue doit remplacer celle qui a été fondue pendant la Révolution. Bien que le préfet Charles Delacroix refuse d'abord sa demande de rouvrir la chapelle, elle est finalement rendue au culte le 4 avril 1807. Ce jour-là une procession part de la major, pour amener la statue de bois jusqu'à la chapelle de la Garde. La traditionnelle procession ne reprendra vraiment qu'en 1814.

La chapelle s'agrandit

[caption id="attachment_15036" align="aligncenter" width="1492"] Le bourdon, lithographie de 1845.[/caption]

Au cours du XIXe siècle, plusieurs visiteurs de marque se rendent sur la colline. Parmi eux on trouve la duchesse de Berry venue en 1816, pour offrir une statuette d'argent, après avoir échappé à un naufrage. Avec le temps la fréquentation de la chapelle Notre-Dame-de-la-Garde ne cesse d'augmenter. Cette affluence va nécessiter son agrandissement en 1833. Ainsi sa surface de 150 à 250m². En 1834 c'est l'évêque de Marseille, Mgr Fortuné de Mazenod, qui bénit la nouvelle chapelle agrandie. Et le lieu continue d'attirer, puisqu'en 1838, l'écrivain Chateaubriand viendra rajouter son nom à la liste des visiteurs illustres.

En 1837, c'est grâce aux multiples dons et aux offrandes, qu'une nouvelle statue d'argent de la Vierge est confectionnée par l'orfèvre marseillais Jean-Baptiste Chanuel. D'abord conçue pour remplacer celle fondue pendant la Révolution, elle est aussi une offrande à la Vierge Marie, pour épargner la cité phocéenne d'une nouvelle l'épidémie de choléra.

[caption id="attachment_15037" align="aligncenter" width="720"] Vierge en argent dans l'église supérieure.Par Robert Valette — Travail personnel, CC BY-SA 4.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=5964831[/caption] En 1843, le clocher de la chapelle est reconstruit pour accueillir un bourdon, commandé au fondeur lyonnais Gédéon Morel et financé par une souscription. Pesant 8 234 kg, le bourdon, baptisé Marie Joséphine, est béni en octobre 1845. Son installation sur la colline est un véritable défi, nécessitant l'aide de 26 chevaux et de cabestans. Le bourdon résonne pour la première fois le 8 décembre 1845.

La construction de Notre Dame de la Garde

[caption id="attachment_15033" align="aligncenter" width="1121"] Vue intérieure et décor romano-byzantin. Par Christian Barth — Travail personnel, CC BY-SA 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=21337568[/caption]

Le projet d'Espérandieu

Le projet de construction d'une nouvelle église sur la colline débute en 1850, lorsque le père Jean-Antoine Bernard demande l'autorisation de reconstruire en plus grand la chapelle existante. Grâce à l'appui du général Adolphe Niel, l'autorisation est accordée en 1852. Le 23 juin 1853, Henri-Jacques Espérandieu est nommé architecte. L’architecte qui a déjà travaillé sur plusieurs projets à Marseille, conçoit un édifice majestueux de style néobyzantin, avec des murs en pierre de taille blanche ornés de mosaïques colorées représentant des scènes bibliques et un dôme recouvert de feuilles d'or, tandis que l'intérieur de l'église est décoré de fresques et de statues représentant des saints et des anges. Le monument véritable mélange de styles romans et byzantins, incluant des éléments décoratifs inspirés du Moyen Âge et de la Renaissance, est également équipé d'une cloche de 8 tonnes et d'un carillon de 19 cloches, qui sonnent tous les jours à midi.

Des travaux et des problèmes

Désormais la construction de la basilique Notre-Dame de la Garde peut débuter, et la pose de la première pierre a lieu le 11 septembre 1853. Les travaux commencent et les problèmes aussi. Pendant toute la durée de la construction, le chantier sera ralenti. Le plus souvent à cause des difficultés financières, ou de problèmes techniques comme la dureté de la roche. Le chantier est même interrompu entre 1859 et 1861. Suite à l'arrivée du nouvel évêque Mgr Patrice Cruice en 1861, les travaux reprennent et sont enfin achevés. L'achèvement de ces travaux est dû en majeure partie, à la générosité de citoyens de toutes confessions et conditions sociales. Les travaux vont durer 11 ans, avant que Notre-Dame de la Garde ne soit consacrée officiellement le 5 juin 1864.

La statue monumentale de la Vierge

[caption id="attachment_15040" align="aligncenter" width="935"] Notre Dame de la Garde. Beffroi, campanile et statue de la Vierge à l'enfant. Par Hedwig Storch — Travail personnel, CC BY-SA 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=2877888[/caption] Le campanile destiné à recevoir la statue monumentale de la Vierge est construit en 1867. Le choix de la statue, en cuivre et réalisée par la galvanoplastie, revient à l'artiste Eugène-Louis Lequesne. La statue est achevée en 1869 et consacrée en 1870. Après le décès d'Espérandieu en 1874, Henri Antoine Révoil est chargé du décor intérieur de la basilique, en particulier des mosaïques. L'achèvement définitif de la basilique a lieu en 1897, plus de quarante ans après la pose de la première pierre.

Un funiculaire pour monter à Notre Dame de la Garde

[caption id="attachment_15039" align="aligncenter" width="1868"] Funiculaire vu depuis la rue Dragon.[/caption] Un funiculaire est construit en 1892 pour faciliter l'accès à la colline, mais il cesse son activité en 1967 pour des raisons de non-rentabilité. Depuis 2016, un projet de téléphérique urbain est en cours de discussion pour relier le Vieux-Port au sommet de la colline. Sa construction a été financée en grande partie par des dons collectés auprès des habitants de toute la ville. Les Marseillais qui ont répondu généreusement à l'appel, ont donc contribué massivement à la construction de l'un des monuments les plus emblématiques de leur ville.

La bonne mère, toujours là pour protéger le peuple marseillais

 Dès sa création, Notre Dame de la Garde apparaît aux Marseillais, comme "une bonne mère" protectrice. Les marins qui avaient échappé à un naufrage venaient remercier la Vierge Marie, en faisant des offrandes et des dons. Au fil du temps, les Marseillais vont se retrouver régulièrement protégés par la Bonne Mère. En 1917 d’abord, quand lors de la Première Guerre mondiale, l'église est utilisée comme poste d'observation pour surveiller les mouvements de navires ennemis se dirigeant vers le port de Marseille. Pendant la Seconde Guerre mondiale, elle servira de refuge à des Marseillais fuyant les bombardements avant que Notre-Dame de la Garde ne devienne un poste d'observation pour l'armée allemande. En 1944, lors de la libération de Marseille, la basilique est gravement endommagée par des bombardements. Cependant, grâce aux efforts de reconstruction, la basilique a été restaurée et rouverte en 1948.

Pourquoi visiter Notre Dame de la Garde

[caption id="attachment_15038" align="aligncenter" width="1920"] La basilique Notre Dame de la Garde dominant Marseille[/caption] Aujourd'hui, la basilique Notre-Dame de la Garde est un lieu de culte et de pèlerinage important pour les catholiques, mais aussi un site touristique majeur, un lieu de promenade populaire, offrant des vues spectaculaires sur la ville et la mer Méditerranée. En effet, le panorama depuis le parvis de la basilique offre une vue imprenable sur la ville, le port, les îles et les montagnes environnantes. Les touristes peuvent également y admirer les nombreuses offrandes laissées en remerciement pour les miracles attribués à la Vierge Marie. Que ce soit pour des raisons spirituelles ou touristiques, la basilique Notre-Dame de la Garde offre un cadre de paix et de contemplation qui mérite une visite pour découvrir son histoire riche et sa beauté majestueuse.