
La faculté de médecine de Montpellier : 800 ans d’histoire
2 Rue de l'École de Médecine Montpellier
Depuis huit siècles, Montpellier incarne une exception dans l’histoire médicale mondiale. Sa faculté de médecine, la plus ancienne du monde, et la seule à avoir transmis son savoir sans interruption depuis le Moyen Âge, est née d’un élan de liberté intellectuelle unique. De Rabelais à l’intelligence artificielle, ce lieu continue de former des générations de soignants, entre tradition humaniste et innovation.
L'HISTOIRE EN BREF
Une médecine libre au cœur du Moyen Âge
L'entrée de la Faculté de Médecine de Montpellier.
À la différence des grandes cités antiques voisines, Montpellier naît au Xe siècle, dans les bras des seigneurs Guilhem, mais se forge rapidement une vocation savante. La ville regarde vers la Méditerranée, commerce avec Gênes et Pise, accueille juifs, chrétiens et musulmans, et tisse des liens précieux avec Rome. Ce terreau de tolérance va donner naissance à une médecine libre et cosmopolite.
Dès le début du XIIe siècle, des praticiens comme André le médecin exercent hors de tout cadre officiel. En 1181, l’édit du seigneur Guilhem VIII proclame la liberté d’enseigner la médecine : un geste d’avant-garde en Europe. En 1220, cette pratique informelle est reconnue par le cardinal légat Conrad d’Urach, qui accorde à l’Universitas medicorum ses premiers statuts. Et en 1289, le pape Nicolas IV fonde l’Université de Montpellier, un Studium generale ouvert à tous les savoirs, où la médecine devient l’un des pôles majeurs de savoir.
À une époque où la médecine est sous contrôle ecclésiastique, Montpellier fait figure d’exception. Son enseignement, laïc, est porté par des maîtres juifs, arabes, chrétiens, dans un esprit d’ouverture rare au Moyen Âge.
De la botanique à la dissection : Montpellier invente la médecine moderne
Grand hall d'entrée dans la faculté de médecine.
Du XIIIe au XVIe siècle, Montpellier devient un carrefour intellectuel européen. Grâce à sa proximité avec la papauté d’Avignon, elle forme les médecins des papes, développe des liens avec les universités italiennes, et bâtit en 1450 son Collège royal de médecine, garant de son autonomie.
Bassin de l'école de botanique dans le jardin des plantes.
L’âge d’or s’épanouit avec la Renaissance. En 1593, sur ordre d’Henri IV, le professeur Pierre Richer de Belleval fonde le Jardin des plantes de Montpellier — le tout premier de France — destiné à l’étude des plantes médicinales. La faculté devient alors un laboratoire vivant, où se croisent botanique, dissection, observation clinique et transmission du savoir. Parmi les figures marquantes, François Rabelais vient y étudier, séduit par la liberté intellectuelle des lieux. Plus tard, Guy de Chauliac, pionnier de la chirurgie médiévale, et Lapeyronie, brillant chirurgien montpelliérain et futur premier chirurgien du roi, y feront rayonner la médecine française.
Révolution, rupture et renaissance républicaine
Timbre poste émis le 13 juin 2020 pour les 800 ans de la Faculté de Médecine de Montpellier
En 1793, la Révolution supprime toutes les universités françaises. Mais l’histoire de Montpellier ne s’interrompt pas. En 1794, la Convention crée les Écoles de santé, et Montpellier renaît aux côtés de Paris et Strasbourg. En 1795, la faculté s’installe dans le monastère Saint-Benoît, où le savant Jean-Antoine Chaptal crée un théâtre d’anatomie inspiré des écoles italiennes. Puis, en 1803, un décret impérial impose le doctorat en médecine : acte fondateur de la faculté moderne, où médecine et chirurgie sont désormais unifiées.
Conservatoire d'anatomie de la faculté de médecine de Montpellier.
Depuis huit siècles, la faculté de médecine de Montpellier n’a jamais cessé d’enseigner. Elle a formé des générations de soignants, traversé les guerres, les pandémies, les révolutions — sans jamais rompre le fil de la transmission. Aujourd’hui, entre les murs historiques du centre-ville et les laboratoires ultramodernes du campus Arnaud de Villeneuve, la faculté conjugue recherche de pointe et héritage humaniste. Bioéthique, médecine personnalisée, intelligence artificielle : les défis du XXIe siècle ne l’effraient pas. Fidèle à son esprit d’origine, Montpellier poursuit un dialogue constant entre l’héritage d’Hippocrate et les défis médicaux de demain.
Photo de couverture : wikipedia
"... Le présent ouvrage est une oeuvre collective. Tous les auteurs de ce livre ont travaillé ou travaillent à l'UFR de Médecine Montpellier-Nîmes. Ils vous promèneront à travers son histoire et ses richesses patrimoniales."
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GLOSSAIRE
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Studium generale : Terme médiéval désignant une université reconnue par l’Église ou le pouvoir royal, autorisée à délivrer des diplômes valables dans tout le monde chrétien (ubique terrarum). Montpellier reçoit ce statut en 1289.
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Universitas medicorum : Nom donné à la première communauté organisée de médecins-enseignants à Montpellier au XIIe siècle, avant la fondation de l’université.
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Bulle papale : Décret officiel émis par un pape. Celle du pape Nicolas IV en 1289 (Quia Sapientia) officialise l’université de Montpellier.
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Guilhem VIII : Seigneur de Montpellier au XIIe siècle. En 1181, il proclame la liberté d’enseignement de la médecine dans la ville, acte fondateur de la vocation médicale montpelliéraine.
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Jardin des plantes de Montpellier : Créé en 1593, il s’agit du plus ancien jardin botanique de France. Conçu pour l’étude des plantes médicinales, il joue un rôle clé dans la formation des futurs médecins.
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Pierre Richer de Belleval : Médecin du roi Henri IV et fondateur du Jardin des plantes. Il incarne la transition vers une médecine d’observation et d’étude de la nature.
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Théâtre d’anatomie : Salle d’enseignement construite par Chaptal en 1795 dans les nouveaux locaux de la faculté. Utilisée pour la dissection humaine, elle marque l’entrée dans une médecine scientifique.
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Jean-Antoine Chaptal : Médecin, chimiste et homme d’État, il réforme l’enseignement médical après la Révolution et réorganise la faculté dans un cadre moderne.
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Écoles de santé : Créées en 1794 pendant la Révolution, elles remplacent temporairement les universités dissoutes. Montpellier fait partie des trois écoles retenues avec Paris et Strasbourg.
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Décret de 1803 : Loi napoléonienne imposant l’obtention du doctorat pour exercer la médecine, fondant ainsi le système des facultés médicales modernes.
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Lapeyronie : Chirurgien montpelliérain du XVIIIe siècle, devenu premier chirurgien du roi Louis XV. Il symbolise l’excellence chirurgicale formée à Montpellier.
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Guy de Chauliac : Médecin et chirurgien du XIVe siècle, auteur d’un traité majeur. Il a étudié à Montpellier et contribué à la reconnaissance de la chirurgie comme discipline scientifique.
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