Le France : l'épopée du dernier géant des mers français

F4P7+9R Le Havre Seine-Maritime

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Construit pour incarner la grandeur française, le paquebot France était un symbole des Trente Glorieuses. Depuis son port d’attache, le France navigua fièrement entre le Havre et New York des centaines de fois, avant de connaître une fin controversée. Aujourd’hui, seule sa proue exposée sur le port du Havre, rappelle le lien étroit qui unissait ce navire de légende à la ville normande. Voici l’histoire du France, un géant qui est resté le plus grand paquebot du monde pendant 42 ans.

 


L'HISTOIRE EN BREF

Le France : un chef-d’œuvre des chantiers de Saint-Nazaire

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 Saint-Nazaire le 11 mai 1960, devant des milliers de spectateurs, le paquebot FRANCE descend la cale où il a été construit pour rejoindre l'océan Atlantique. 

Dans l’effervescence des Trente Glorieuses, la France cherchait à réaffirmer son prestige international. Le projet du paquebot France naquit en 1955, porté par l’ambition de rivaliser avec les légendes maritimes britanniques et américaines, comme le Queen Mary ou le United States. Ces navires luxueux dominaient les traversées transatlantiques entre l’Europe et l’Amérique. Pour la France, il s’agissait de marquer son retour sur la scène maritime mondiale, après les difficultés de l’après-guerre. La construction du France débuta en 1956 aux Chantiers de Saint-Nazaire.

Plus de 20 000 ouvriers s’activèrent pour bâtir ce géant des mers, qui coûta 459 millions de francs – une somme astronomique pour l’époque. Avec ses 315,66 mètres de long, il était le plus grand paquebot jamais construit, poussé par des moteurs de 160 000 chevaux lui permettant d’atteindre une vitesse de croisière de 30 nœuds (55Km/H). Conçu pour accueillir plus de 2 000 passagers, le France offrait un luxe inégalé avec des installations avant-gardistes comme la climatisation et les stabilisateurs anti-roulis. . Le 11 mai 1960, lors de son lancement, Yvonne de Gaulle, marraine du navire, le baptisa sous le regard fier de son époux, Charles de Gaulle. Ce moment symbolisait  le grand retour du savoir-faire français sur la scène internationale, grâce à un savant mélange d’ingénierie et d’élégance. Après des essais en mer qui confirmèrent ses performances éblouissantes, le France était prêt à conquérir l’Amérique.

Paquebots - Le triomphe de l'art déco - L'art du voyage à la française - 1

Le France, une légende de l’Atlantique

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Sur le quai des gens regardent les manœuvres du nouveau paquebot le « France », après son voyage d'essai. 

Le 23 novembre 1961, à 12 h 45, le port du Havre vibrait d’excitation alors que le France arrivait pour la première fois dans son port d’attache. Sa silhouette imposante suscitait admiration et fierté. Quelques semaines plus tard, après les derniers préparatifs, les habitants du Havre furent les témoins privilégiés de plusieurs événements historiques. Tout d’abord, le 11 janvier 1962, le navire fut inauguré en présence du Premier ministre Michel Debré. Puis, le 19 janvier 1962, il quitta son port pour sa croisière inaugurale. Pour cette occasion, 1 700 passagers triés sur le volet se trouvaient à bord, dont Yvonne de Gaulle et le chanteur Tino Rossi. Les passagers découvrirent des installations époustouflantes dignes d'un palace flottant : des salons décorés avec raffinement, deux piscines, des restaurants gastronomiques dirigés par des chefs de renom, et même un théâtre équipé pour des spectacles grandioses. Le capitaine Georges Croisille, fier de son équipage, dirigeait le paquebot avec une précision remarquable.

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Enfin, arriva le jour de la première traversée transatlantique. Le 3 février 1962, des milliers de Havrais se rassemblèrent sur les quais pour voir ce navire extraordinaire s’éloigner sous les cornes de brume. Sur le France, 1 800 passagers s’apprêtaient à effectuer une traversée de cinq jours. À bord, les passagers profitaient d’activités variées : cours de danse, de gymnastique, dégustations de vins, séances de cinéma et concerts. Pour cabines de première classe étaient équipées de téléphone et de la télévision, une première sur un navire de cette taille. Cette traversée unique fut marquée par une violente tempête. Enfin, le 8 février 1962, le France croisait la statue de la Liberté avant de faire une entrée triomphale à New York, escorté par une flottille de bateaux. Sur les quais, des dizaines de milliers de curieux et d’admirateurs se pressèrent pour contempler ce chef-d’œuvre flottant. Pendant plus d’une décennie, le France navigua sur l’Atlantique, reliant des centaines de fois l’Europe et l’Amérique. Le paquebot devint rapidement une véritable ambassade culturelle tricolore, transportant même des œuvres d’art prestigieuses comme La Joconde.

Sur les paquebots - 1

Le déclin du France, la fin d'une époque

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Un groupe de remorqueurs accueille à New York le paquebot français qui vient de terminer son voyage inaugural en traversant l'océan Atlantique. 

Malgré son succès initial, le France subit la concurrence croissante des avions gros porteurs, comme le Boeing 707, qui révolutionnèrent les transports transatlantiques. En 1974, la crise pétrolière aggrava la situation : les coûts d’exploitation devinrent insoutenables, et le gouvernement français refusa de continuer à financer le navire. Cette décision provoqua une mutinerie des marins au Havre, qui dura plusieurs semaines. Les marins bloquèrent l’accès au navire, organisèrent des manifestations sur les quais et exigèrent la sauvegarde du France. Le France fut finalement immobilisé dans le port du Havre, amarré pendant près de cinq ans sur le désormais célèbre quai de l’oubli. En août 1979, une foule silencieuse se réunit une dernière fois pour lui faire ses adieux. Le navire, avant de prendre la mer, envoya, dans un dernier hommage, trois longs coups de sirène. Malgré la tradition maritime, les cornes de brume des remorqueurs du port restèrent silencieuses, bien décidées à marquer un peu plus l’amertume de cet au revoir. 

SS France moored in Le Havre, 1978

Le France sur "le quai de l'oubli" en août 1979 

Le France fut vendu à un richissime Saoudien, puis à Knut Kloster, un armateur norvégien, qui le rebaptisa Norway. Transformé en navire de croisière, il navigua dans les Caraïbes, mais ne retrouva jamais la magie de ses débuts. En 2003, une explosion à bord scella son destin. Jugé trop coûteux à moderniser, il fut remorqué en Inde pour y être démantelé en 2009. Aujourd’hui, seule la proue du France au Havre, demeure comme un ultime témoignage de ce qui restera dans les mémoires, comme un symbole éclatant de l’élégance et de l’ingénierie françaises.


Le Paquebot France - 1

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