Vichy 1940 : le vote qui enterra la République

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EN RÉSUMÉ

Le 10 juillet 1940, les députés et sénateurs se rassemblent à Vichy pour une séance décisive. La France vient d’être vaincue par l’Allemagne nazie, Paris est occupé et l’exode a jeté des millions de Français sur les routes. La ville thermale de Vichy a été choisie pour accueillir le gouvernement : située en zone libre, elle est relativement préservée par la guerre et dispose de grands hôtels capables d’abriter l’administration et les parlementaires. Réunis en Assemblée nationale, les élus doivent se prononcer : faut-il confier les pleins pouvoirs au maréchal Philippe Pétain pour rédiger une nouvelle Constitution ?

Le vote se déroule dans la salle de l’Opéra de Vichy, l’un des rares édifices pouvant accueillir tous les parlementaires. L’ambiance est lourde, tendue, presque crépusculaire. Beaucoup d’élus sont accablés par la chute de la Troisième République, accusée d’impuissance. Certains voient en Pétain, héros de Verdun, l’homme providentiel capable de restaurer l’ordre et de négocier avec l’occupant. D’autres redoutent qu’en votant oui, la République ne se suicide elle-même. Le texte soumis promet un régime fondé sur « le travail, la famille et la patrie », loin des idéaux de 1789.

Le résultat tombe : 569 pour, 80 contre, 20 abstentions. Le texte adopté est le suivant :

"L’Assemblée nationale donne tous pouvoirs au Gouvernement de la République, sous l’autorité et la signature du maréchal Pétain, à l’effet de promulguer par un ou plusieurs actes une nouvelle constitution de l’État français. Cette constitution devra garantir les droits du travail, de la famille et de la patrie."

Parmi les opposants, des figures comme Léon Blum, Vincent Auriol, Paul Ramadier, Georges Mandel, Pierre Mendès France et Max Dormoy. Ce dernier, farouche républicain, sera assassiné en 1941 par la Cagoule, organisation d’extrême droite. Dès le lendemain, la loi est promulguée. Le maréchal concentre désormais tous les pouvoirs, fonde l’État français et ouvre la voie au régime de Vichy. Mais des décennies plus tard, la République rappellera qu’elle n’avait jamais cessé d’exister.

Crédit photo / Source : wikipedia


LEXIQUE

  • Assemblée nationale : Réunion exceptionnelle des députés et des sénateurs en juillet 1940, chargée de voter les pleins pouvoirs.

  • Plein pouvoirs : Pouvoirs constituants, législatifs et exécutifs confiés à une seule personne ou institution.

  • État français : Nom officiel donné au régime de Vichy après la fin de la Troisième République.

  • Troisième République : Régime politique français en place de 1870 à 1940, remplacé par le régime de Vichy.


PERSONNAGES HISTORIQUES

  • Philippe Pétain : Maréchal de France, vainqueur de Verdun en 1916, devenu chef du gouvernement en 1940 et bénéficiaire des pleins pouvoirs.

  • Léon Blum : Homme politique socialiste, ancien président du Conseil, vota contre les pleins pouvoirs à Pétain.

  • Vincent Auriol : Député socialiste, opposant au vote, futur président de la République (1947-1954).

  • Paul Ramadier : Député socialiste, fit partie des « 80 » parlementaires ayant refusé les pleins pouvoirs.

  • Georges Mandel : Homme politique radical, résistant au régime de Vichy, vota contre.

  • Pierre Mendès France : Député radical-socialiste, opposant au vote, futur président du Conseil (1954-1955).

  • Max Dormoy : Député socialiste, l’un des « 80 » qui votèrent contre Pétain ; assassiné en juillet 1941 par la Cagoule, organisation d’extrême droite.


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