
La Prison Jacques-Cartier de Rennes, du cachot à la cité citoyenne
56 Bd Jacques Cartier Rennes
EN RÉSUMÉ
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Derrière ses murs de schiste pourpre, la prison Jacques-Cartier raconte un siècle d’enfermement, de drames et de renaissance. Construite en 1903 pour incarner la modernité carcérale, elle devient aujourd’hui un laboratoire citoyen, où la mémoire des geôles se mêle aux rêves de liberté.
À l’aube du XXᵉ siècle, la prison Jacques-Cartier surgit au sud de Rennes, perdue dans les champs. Son architecte, Jean-Marie Laloy, imagine un bâtiment en croix latine inspiré du modèle panoptique, symbole d’une justice qui veut surveiller et réformer. Chaque cellule individuelle de 9 m², éclairée et ventilée, doit isoler le détenu face à sa conscience. Avec ses murs de schiste rouge, sa rotonde coiffée d’une lanterne de verre et son austère façade de granit, elle incarne la République et sa foi dans la rédemption par l’ordre.
Couloir central dans la prison Jacques-Cartier de Rennes.
Mais derrière la pierre, les drames s’accumulent. Deux guillotines dressées devant le portail, en 1922 et 1939, rappellent la rigueur de la justice d’alors — le dernier condamné, Maurice Pilorge, inspira d’ailleurs à Jean Genet Le Condamné à mort. Durant l’Occupation, les nazis réquisitionnent la prison : des résistants bretons, dont Thérèse Pierre et Pierre Dordain, y sont torturés et meurent en 1943. Dans les couloirs glacés, les pas résonnent encore de ceux qui n’en sont jamais sortis. Le train de Langeais, parti d’ici en août 1944, emporte plus d’un millier de déportés vers l’Allemagne. Après guerre, l’établissement s’étend, se surpeuple, se délite. En 2010, les derniers prisonniers partent pour Vezin-le-Coquet. Le silence retombe sur la butte de Villeneuve.
Aujourd’hui, la métropole de Rennes a repris le site pour en faire un lieu de mémoire et de création. Derrière la porte bleue, les habitants imaginent un espace citoyen : ateliers d’artistes, jardins partagés, actions sociales et fresques murales redonnent vie aux murs. Chaque automne, des milliers de visiteurs arpentent ses cours lors des Journées du Patrimoine, écoutant les voix de la prison ressurgir du passé.
Crédit photo de couverture / Source : chisloup, CC BY 3.0, via Wikimedia Commons
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