
L'ouvrage du Hackenberg, le géant de la ligne Maginot
Rte Militaire Veckring Moselle
EN RÉSUMÉ
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Creusé dans la colline de Veckring, en Moselle, l’ouvrage du Hackenberg est le plus vaste fort de la ligne Maginot. Entre 1929 et 1936, les ingénieurs français bâtissent dix kilomètres de galeries, dix-neuf blocs de combat, une centrale électrique et une voie ferrée souterraine. Véritable cité militaire, il incarne l’obsession défensive de la France d’entre-deux-guerres, décidée à ne plus revivre Verdun.
Conçu dans l’après-1918, l’ouvrage A19, surnommé l’ouvrage du Hackenberg, symbolise cette foi dans la fortification moderne. Équipé de tourelles motorisées, de canons de 75 mm et de 135 mm, il domine la vallée de la Moselle et veille sur la frontière du pays thionvillois. Lorsque la guerre éclate en juin 1940, les équipages tiennent leurs positions, abrités dans les entrailles de la colline. Les tirs d’artillerie couvrent les ouvrages voisins et ralentissent l’avance allemande. Aucun assaut ne parvient à l’emporter : c’est l’armistice du 22 juin qui ordonne le silence des armes. Quatre ans plus tard, en novembre 1944, le fort reprend vie au cœur des combats de la campagne de Lorraine : la 3ᵉ armée américaine du général Patton affronte les troupes allemandes retranchées dans les blocs, notamment autour du bloc 8, où l’ouvrage subit de violents tirs avant d’être repris.
Immédiatement après le début de la campagne, le lieutenant-général Kurt Daluege vient inspecter l'ouvrage d'Hackenberg, ici le bloc 24 et en contrebas le bloc 25.
Vivre au Hackenberg, c’était habiter une ville souterraine. Plus de 1 000 hommes y cohabitaient, coupés du monde extérieur, dans un labyrinthe ponctué de dortoirs, de réfectoires, d’ateliers et de postes de commandement. Dans les galeries, le train à munitions circulait sans relâche, guidé par des lampes bleues. L’air saturé d’huile chaude, la vibration des ventilateurs anti-gaz, la condensation sur les murs rappelaient à chacun la présence du danger. Tout y était pensé pour tenir un siège de plusieurs mois : des réservoirs d’eau, une boulangerie, une infirmerie et même des latrines autonomes. Dans ce microcosme de guerre, le temps semblait suspendu sous des tonnes de roc.
Cuisine dans le Fort Hackenberg à Veckring
Après 1945, le fort fut brièvement réutilisé pendant la guerre froide avant d’être désarmé à la fin des années 1960. Sauvée de l’oubli, la forteresse est aujourd’hui restaurée par l’association AMIFORT, qui lui redonne vie à travers des visites guidées, des démonstrations de tourelles en mouvement et le convoi du petit train d’époque. Chaque couloir y raconte la discipline, la peur et la solidarité d’une génération de soldats. Sous la colline de Veckring, l’ouvrage du Hackenberg reste une cathédrale d’acier et de silence, mémoire intacte d’un siècle obsédé par la défense de son sol.
Crédit photo de couverture / Source : Morten Jensen from Randers, Denmark, CC BY 2.0, via Wikimedia Commons
